La notion de « folie » est complexe et peut être interprétée de différentes manières selon les cultures, les époques et les sociétés. En psychiatrie, on parle souvent de « troubles mentaux » plutôt que de folie. Mais la limite entre normal et pathologique est si floue que depuis les travaux de Georges Canguilhem, personne n’arrive à la déterminer d’une façon claire et définitive. La différence entre ce qui est normal et ce qui est pathologique en termes de comportement ou de symptômes dépend de plusieurs facteurs, tels que le contexte culturel, les normes sociales et les critères diagnostiques utilisés dans le domaine médical.
En général, le comportement ou les symptômes sont considérés comme normaux s’ils ne causent pas de détresse significative ou de handicap fonctionnel à la personne qui les présente, et s’ils sont cohérents avec les attentes culturelles et sociales. Par exemple, il est normal de ressentir de la tristesse ou de l’anxiété à certaines occasions, comme la perte d’un être cher ou l’anticipation d’un événement stressant.
En revanche, si ces émotions deviennent envahissantes, durent plus longtemps que prévu ou entraînent une détresse significative ou un handicap fonctionnel, elles peuvent être considérées comme pathologiques. De même, certains comportements, tels que la consommation modérée d’alcool, peuvent être considérés comme normaux dans certaines cultures ou contextes, mais peuvent être considérés comme pathologiques s’ils deviennent excessifs ou entraînent des conséquences négatives pour la santé ou le fonctionnement social.
Dans le domaine médical, la différence entre normal et pathologique est souvent déterminée par des critères diagnostiques tels que ceux établis dans le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM) ou la Classification internationale des maladies (CIM). Ces critères peuvent varier selon les troubles et les contextes, mais ils sont souvent basés sur des symptômes spécifiques, leur durée et leur impact sur le fonctionnement social et professionnel de la personne.
En résumé, la différence entre normal et pathologique dépend du contexte culturel, des normes sociales et des critères diagnostiques utilisés. En général, les comportements ou symptômes sont considérés comme normaux s’ils sont cohérents avec les attentes culturelles et sociales, ne causent pas de détresse significative et ne nuisent pas au fonctionnement social et professionnel. En revanche, s’ils deviennent excessifs, envahissants ou entraînent une détresse significative ou un handicap fonctionnel, ils peuvent être considérés comme pathologiques.
Facteurs psychopathogènes
Les troubles mentaux peuvent être causés par une combinaison de facteurs biologiques, psychologiques et environnementaux. Voici donc quelques exemples de facteurs qui peuvent contribuer à l’apparition de troubles mentaux :
Les facteurs biologiques :
Des déséquilibres chimiques ou hormonaux, des prédispositions génétiques, des maladies ou des traumatismes cérébraux peuvent affecter le fonctionnement du cerveau et contribuer au développement de troubles mentaux. La prise de toxique est également un facteur qui vient déséquilibrer le psychisme.
Les facteurs psychologiques :
Des expériences traumatisantes, des conflits émotionnels non résolus, une faible estime de soi, des troubles de l’attachement ou des troubles de la personnalité peuvent tous contribuer à l’apparition de troubles mentaux. Des stress majeurs vont ainsi provoquer une décompensation de la structure psychique d’un individu qui jusqu’alors était en équilibre.
Facteurs environnementaux :
Le stress chronique, la pauvreté, la violence, la discrimination, la toxicomanie ou l’alcoolisme peuvent tous contribuer à l’apparition de troubles mentaux.
Il est important de souligner que les troubles mentaux sont des affections médicales qui peuvent être traitées et gérées avec une psychothérapie en présentiel ou à distance. Il est également important de noter que les personnes atteintes de troubles mentaux peuvent mener des vies productives et satisfaisantes avec un traitement et un soutien appropriés.
Sait-on lorsqu’on devient fou ?
Il n’y a pas de réponse simple à cette question car l’expérience de la « folie » ou des troubles mentaux peut varier considérablement d’une personne à l’autre, en fonction du type de trouble et de son intensité. Cependant, dans certains cas, il est possible pour une personne de percevoir les signes avant-coureurs de l’apparition de symptômes de troubles mentaux.
Les signes avant-coureurs peuvent varier selon les troubles mentaux, mais certains peuvent inclure :
Des changements dans les habitudes de sommeil ou d’alimentation
Des sentiments persistants de tristesse, d’anxiété ou d’irritabilité
Des difficultés à se concentrer ou à se souvenir des choses
Des pensées ou des comportements inhabituels ou impulsifs
Des changements dans la perception de la réalité, tels que des hallucinations ou des idées délirantes
Des difficultés à gérer les activités quotidiennes ou à maintenir des relations sociales.
Cependant, il est important de noter que les signes avant-coureurs ne sont pas toujours évidents et que certaines personnes peuvent ne pas reconnaître les changements dans leur comportement ou leur état mental. En outre, les troubles mentaux peuvent se développer lentement au fil du temps, ce qui peut rendre difficile la distinction entre ce qui est normal et ce qui ne l’est pas.
Si vous pensez que vous ou un proche présentez des signes avant-coureurs de troubles mentaux, il est important de chercher de l’aide auprès d’un psychologue ou un psychiatre dès que possible. Le traitement précoce peut aider à prévenir l’aggravation des symptômes et à améliorer les résultats à long terme.
Après une définition de ce qu’est l’interprétation en psychothérapie, nous allons voir si elle est propre à la psychologie, comment et sur quoi s’appuie une interprétation fiable et pertinente et surtout a-t-elle une valeur thérapeutique pour les patients ?
Tout au long de ce questionnement, je vais illustrer chaque point grâce au film Watchmen de Zack Snider car vous allez voir comment nous allons y rencontrer différentes interprétations, différentes ré-interprétations et les conséquences que cela va avoir pour les protagonistes.
Qu’est-ce que l’interprétation ?
Pour le Larousse, « Interpréter » c’est expliquer, ou donner un sens à un discours ou un récit.Pour ma part, j’avance dès à présent une première subtilité à cette définition pour qu’elle s’applique davantage à la définition psychologique de l’interprétation : Il ne s’agit pas tant de « donner » un sens, mais de « prêter » un sens.Cette précision est fondamentale et nous en reparlerons plus tard, mais je veux dès à présent casser le caractère définitif que pourrai revêtir l’interprétation en rappelant qu’elle n’est toujours qu’hypothèse.
Si l’on se réfère au « Vocabulaire de la psychanalyse » de Laplanche et Pontalis on trouve la définition suivante :
Dégagement, par l’investigation analytique, du sens latent dans le dire et les conduites d’un sujet. L’interprétation met à jour les modalités du conflit défensif et vise en dernier ressort le désir qui se formule dans toute production de l’inconscient.
Dans la cure, communication faite au sujet et visant à le faire accéder à ce sens latent selon les règles commandées par la direction et l’évolution de la cure.
Cela pose plusieurs bases importantes de l’interprétation :
l’interprétation ne doit pas sortir de nul part, mais bien d’une investigation précise et fondée, par l’analyse des manifestations concrètes du conflit psychique
Son moyen est de traduire un fait que le sujet n’a pu traduire par lui-même sur ses motivations, fantasmes et désirs propres
Son but est d’ouvrir un nouveau champ des possibles pour faire progresser la cureOn constate donc que l’interprétation à plusieurs valeurs, dont celle de respecter une méthodologie stricte et d’avoir une vertu thérapeutique.
On verra ça un peu plus loin en détail mais si une interprétation n’a pas ces deux valeurs minimum, autant se taire.
Par conséquent, Cela m’amène à deux idées reçues sur l’interprétation en psychanalyse :Un, elle ne peut être fréquente, car elle répond à une technique précise et qui ne se produit pas toutes les trois phrases de nos patients… Donc non, le psychologue et le psychanalyste n’interprètent pas à tout bout de champDeuxièmement, nous avons bien plus souvent affaire aux interprétations de nos patients qu’à celles du professionnel
Est-ce que l’interprétation est le propre de la psychologie ?
Bien sûr que non, elle est le fait de formuler une hypothèse et en aucun cas une vérité donc elle est appliquée et applicable à toute pratique et rapport humain.Dans le film Watchmen, on peut voir que toute la logique du film tourne autour de l’interprétation. Tout le monde se pose des questions et interprète ce qu’il se passe à la lumière des rares éléments en leur possession- Que ce soit les américains et les russes sur leurs motivations nucléaires
– Les Watchmens sur les motivations du Dr Manhattan
– La population sur le moment de l’apocalypse
– Rorschach sur les motivations du tueur de Watchmen
– Les Watchmen de façon générale interprètent la place qui devrait être la leur dans une société qui les pousse à se cacher et cesser toute activité
Dans une simple discussion, notre cerveau et notre sensibilité se conjuguent sans cesse pour interpréter notre environnement et ce qui nous est adressé. Nous sommes des êtres qui passent leur vie entière à interpréter le monde qui nous entoure pour lui donner un sens et il est constant que face à de nouvelles informations objectives ou subjectives nous ré-interprétions sans cesse ce que nous avions interprété au préalable.
Lorsqu’on se forme à un domaine particulier nous passons d’une interprétation non plus instinctive mais disons professionnelle. Que ce soit un médecin, un architecte, un boulanger, un maçon ou autre, le professionnel part toujours de l’analyse d’un certain nombre de données pertinentes de son domaine pour interpréter et s’adapter à la marche futur à suivre. L’expertise et l’expérience du professionnel vont donc l’amener à échafauder des interprétations de son milieu ou du problème de plus en plus précises mais sans jamais garantir que la première interprétation soit la bonne.
Il devra parfois ré-interpréter la situation pour une solution adéquat.
On voit donc très simplement que interprétations et ré-interprétations sont un outils personnels et professionnels que tout le monde utilise afin de s’adapter positivement à une situation.
Dernier exemple, le plus probant, l’analyse d’oeuvres artistiques. Quelle que soit l’oeuvre, nous savons pertinemment que son analyse et ses interprétations sont le fruit de notre connaissance de ce domaine, de son rapport aux autres productions, de son contexte, des émotions qu’elle suscite en nous et bien d’autres facteurs.
Mais une chose est certaine, je ne peux décemment pas avoir une analyse et une interprétation aussi précise et fondée qu’un critique d’art sur un tableau x ou y. Face à son interprétation de la jeune fille à la perle de Vermeer, je ferai certainement mieux de me taire. Mais disons que face à une interprétation que je porterai à un de mes patients, le critique d’art n’aurait certainement pas son mot à dire.
Est-ce que l’interprétation n’est utilisée qu’en psychanalyse ?
Ici encore, la réponse est non.Dans le film Watchmen, même si le personnage de Rorshcach est analysé au moyen de tests projectifs ce qui est à la fois un clin d’oeil et un stéréotype, ce n’est pas l’interprétation du psychiatre qui est la plus intéressante dans le film.Des interprétations plus importantes sont mises en avant et n’ont rien à voir avec de la psychanalyse.
Nous avons affaire à des interprétations
– politiques,
– médicales
– éthiques
– scientifiques et j’en passe
Cependant j’attire votre attention sur deux interprétations personnelles qui sont faites dans le film aussi bien par deux personnages que laissés en suspend pour le spectateur :
Il s’agit de la recherche liée à la filiation du spectre soyeux ET des raisons pour lesquelles Rorschach s’est tant ancré dans un fonctionnement obsessionnel pathologique. Le psychologue, quelle que soit son orientation théorique, se base chaque jour, à chaque séance, sur son interprétation du matériel clinique à sa disposition. Tout d’abord pour ce qui concerne le diagnostic clinique.
Croire qu’en séance les patients nous énumèrent les signes cliniques du DSM est bien loin de la réalité.
Nos patients montrent quelques défenses, telle ou telle angoisse, tel ou tel rapport d’objet et c’est avec tous ces éléments parfois contradictoires que l’on doit interpréter la question diagnostique. Vous voyez que comme je le disais plus tôt, l’interprétation est davantage de l’ordre d’une hypothèse à valider ou infirmer que d’une vérité définitive.
Après, prenons pour exemple un psychologue cognitivo-comportementaliste, durant son suivi.
Il est dans l’obligation d’interpréter quels sont les liens positifs, neutres ou pathologiques entre pensées, émotions et comportement. Il le fait depuis son interprétation du discours de son patient qui lui même interprète son fonctionnement.
Comme tout psychologue clinicien qui se respecte, le psychologue TCC va doncdevoir interpréter, proposer, calibrer, ré-interpréter et réajuster son intervention. En tout cas, quand il fait bien le job…
Parce que là je peux pas m’empêcher de penser aux psys qui disent à l’avance combien de séances il va y avoir à leurs patients, ce qui est la meilleure preuve que le psy en question ne compte certainement pas les écouter mais administrer son protocole de but en blanc quoi qu’il arrive…
Enfin, j’insiste sur ce qui me semble être le point le plus important à prendre en considération : L’interprétation est le plus souvent, l’interprétation du patient.
En tant que psychologue, psychothérapeute ou psychanalyste, nous devons régulièrement remettre en question si ce n’est stopper net certaines interprétations de nos patients qui leur sont délétères. Face à une interprétation complètement erronée qui témoigne seulement de mécanismes de défenses, d’enfermement dans des schémas ou de biais cognitifs flagrants, briser la première interprétation afin d’en faire émerger de nouvelles est primordial.
Sur quelles données s’appuieune interprétation ?
Dans Watchmen, l’intrigue est similaire à une enquête. L’enquête de Rorschach. En ce sens, elle nous est présentée par son point de vue, or, c’est la 35ème fois que je le dis : « Toutes les vérités auxquelles nous tenons…
À l’instar d’une enquête policière, Rorschach recherche les pistes, les signes et preuves qui vont le mener petit à petit à interpréter des faits, des actes et de façon plus générale, son environnement. Même si a plusieurs moments ses interprétations vont reposer sur quelques biais cognitifs, il finira malgré tout à remanier et ré-interpréter les choses pour parvenir à son coupable…
Son interprétation nous indique donc qu’elle ne se fait pas de façon aléatoire, mais suis une méthodologie, ce qui lui permet de ne pas en faire une certitude, mais un objet mouvant et sensible aux variations des données en sa possession.
Avant de parler de la méthodologie propre à la formulation d’une interprétation solide et pertinente en psychothérapie, il est nécessaire d’aborder le concept de « psychanalyse sauvage ».
Cela renvoi au texte « De la psychanalyse sauvage » de Freud qui en 1910 écrit un court texte riche d’enseignements sur l’interprétation. Dans ce texte, il prend l’exemple d’un médecin ayant donné une interprétation à sa patiente, laquelle s’est tout de suite braquée contre l’interprétation en elle-même et contre son médecin.
Celui-ci aurait selon Freud bafoué les deux règles inhérentes à une bonne interprétation :
– Un, Ne pas attendre que le patient parvienne lui-même à proximité de ce qu’il a refoulé
–Deuxièmement, qu’il n’y ai pas un transfert positif suffisant du patient envers son médecin, ce que l’on peut traduire par le fait que le patient n’a pas eu le temps d’accorder un savoir suffisant à son médecin.
Une interprétation sauvage est donc une interprétation hâtive, qui ne s’appuie sur rien ou pas grand chose et que le patient ne peut sous tendre et lier à des faits objectifs.
Piera Aulagnier, psychiatre et psychanalyste française, parle par exemple de « violence de l’interprétation » et Ester Bick, psychanalyste britannique nous encourage à ne surtout pas « sauter dans des interprétations ».
Vers la fin du texte de Freud sur la psychanalyse sauvage, celui-ci nous rappelle encore « Sans compter du reste que, parfois, on devine faux et qu’on n’est jamais à même de tout deviner ».
Tout cela pour souligner qu’une interprétation est le fruit d’un travail sérieux et méthodique qui se prépare avant d’être prêté à un patient.
L’interprétation en psychologie et en psychanalyse se doit de s’appuyer sur un faisceau de signes cliniques significatifs et objectivants ; d’éléments du langage verbal et non verbal ; d’actes et comportements ; sur des manifestations que le patient perçoit ou tend à percevoir
Sans cela, nous ne sommes pas dans une interprétation mais plutôt une « analyse sauvage »
La méthodologie de l’interprétation est de collecter un certain nombre de données dans le discours, les actes ou projections d’un sujet pour sous-tendre un sens plus profond, moins facile à s’avouer, que l’on rejetterai de prime abord alors que tout dans notre discours et nos actes le clame « haut et fort ». Pour rappel, le patient lui aussi nous donne souvent des interprétations que, pour des raisons éthiques et thérapeutiques, nous devons parfois réfuter.
Collecter les éléments de discours, les manifestations, tous les éléments qui justifient une interprétation et ne la proposer que lorsque le transfert est établi avec un patient proche d’une conclusion similaire, voilà ce qui sous tend une interprétation en séance.
Est-ce que l’interprétation est thérapeutique ?
Quand on se pose la question de l’effet thérapeutique de l’interprétation, ça pose la question « quoi d’autre serait thérapeutique » ? Quelles que soient les thérapies le but est toujours le même, notre patient vient avec une représentation du monde qui le fait souffrir, cela impacte ses cognitions, émotions ou comportements c’est à dire un symptôme qui vient pour tenter de rendre la chose plus supportable.Quelle que soit la thérapie, prêter une autre interprétation, qu’elle soit analytique, cognitive, systémique ou comportementale permet au patient de faire ce premier pas de côté vers SA ré-interprétation et SON repositionnement en tant que sujet.
En ce sens, on ne peut pas dire que l’interprétation émanant du psychologue ne soit thérapeutique. Aussi précise et juste soit-elle l’interprétation n’est pas thérapeutique car elle peut s’évaporer ou n’avoir aucune consistance pour le patient. Ce qui est thérapeutique c’est la ré-interprétation du sujet. Lorsque celui-ci prête une valeur à une interprétation, qu’il la laisse venir faire son travail de bousculer la certitude symptomatique.
Là où le film nous éclaire le plus, c’est sur cet aspect purement subjectif de l’interprétation et comment celle-ci peut à la fois être inacceptable, voire, pathologique ou alors, être thérapeutique car elle vient résoudre une problématique interne. Watchmen est fantastique pour illustrer ces deux possibles :
– Lorsque le sens final est dévoilé, Rorschach n’accepte pas d’adhérer à l’interprétation que lui propose de faire OzzyMandias. Il ne peut accepter cette interprétation qui lui est prêtée. Il garde sa souffrance, il garde son symptôme. Rien ne va changer dans la vision qui est la sienne. Cette scène me mets d’ailleurs un énorme doute sur mon hypothèse structurelle de Rorschach, je ne sais pas si on a un obsessionnel de compétition ou un paranoïaque… Les éléments de la scène de fin viennent bousculer mon interprétation première…
– De l’autre côté, nous avons trois personnages différents qui étaient malades au préalable de l’acte d’OzzyMandias, et de l’interprétation qu’ils en avaient. Cette interprétation leur était tout bonnement intolérable… Puis OzzyMandias leur propose son interprétation. Aussi difficile que cela puisse l’être, le Spectre soyeux, le Docteur Manhattan et le hiboux finissent, non sans mal, à accepter cette nouvelle interprétation.
Cela leur fait ré-interpréter leur positionnement et leur vécu. Cela change surtout la façon qu’ils vont avoir de vivre.
On sent leur douleur, l’impossibilité de vivre avec un tel poids s’ils ne viennent pas à bout de ce grand méchant…
Pour finalement l’accepter et très bien vivre leur vie par la suite… Chose dont n’a pas pu être capable Rorschach.
Chaque patient entendra l’interprétation de son psy comme une hypothèse à laquelle il va nouer un sens. Son sens. L’interprétation doit faire RÉ-agir. Dans un agir autre. Voilà ce que fait l’interprétation.
Le patient opère un pas de côté, ré-interprète son symptôme dans un nouveau champ de possibles. Les barrières sont repoussées et c’est lui qui peut alors décider et trouver une nouvelle voie à son symptôme. Que cela nécessite un nouveau comportement, une nouvelle gestion d’émotion, un nouveau rapport à soi, un nouveau rapport à l’autre.
L’interprétation n’est pas thérapeutique, c’est la porte qu’elle ouvre au patient qui l’est.
Rappelez vous que l’être humain n’est cognitivement pas capable de se représenter le monde tel qu’il est dans le réel. Il n’y a donc pas pour lui nécessité à coller à une vérité universelle. Cela ne serait en rien thérapeutique. Ce sont les représentations que chacun se fait de son environnement et des événements qui alternent entre représentations supportables et représentations pathologiques. Pas les faits objectifs. Notre propre interprétation est la source de notre souffrance psychique.
La ré-interprétation est la clé d’une vie psychique apaisée.
Qui critique la pertinence de l’interprétation ?
Il est de bon ton aujourd’hui pour certains « experts » auto-proclamés de remettre en question la pertinence de l’interprétation psychanalytique.Ces personnes qui – la plupart du temps ne sont pas cliniciens, c’est à dire qu’ils n’ont pas de patients et n’assurent donc pas de suivi psychothérapeutique – cherchent à véhiculer l’idée que l’interprétation est le fait de chercher un sens à tout prix, là où, il n’y en aurait pas et quand bien même il y en aurait un, cela n’aurait pas de valeur.Ils se basent sur des croyances théoriques selon lesquelles des méthodes clefs en main, adaptées à tous et universelles, pourraient être administrées telle des traitements pharmaceutiques et venir en aide à toute la population. Travailler auprès de vrais patients et non de cohortes balaye instantanément ce genre de critiques et croyances intenables dès la première rencontre avec une vraie personne en souffrance.
C’est cocasse mais dans le film c’est la représentation même de l’interprétation de la projection et de l’interprétation qui est dans l’incapacité de faire preuve de souplesse psychique. En croyant à tout prix qu’il n’existe que LA vérité, une vérité pure et objective à laquelle se soumettre, Rorschach est aveuglé et ne souhaite pas voir le plus important.
L’être humain est tel que les faits objectifs n’ont que peu de valeur sur sa pensée. Il est davantage dominé par ses croyances et émotions que par la logique. Il oublie donc que ce n’est pas la logique de l’être humain qui le sauve mais sa spécificité sensible et subjective.
C’est ça qui sauve chaque sujet, rien d’autre.
Tout être humain en souffrance cherche un sens à ses actes, comportements et à sa vie en général. Lui ôter ça, ne pas l’accompagner dans cette recherche revient tout simplement à ne pas l’écouter et juger immédiatement de ce qui serait le mieux pour lui. Rien à voir donc avec le travail de psychologue quel que soit son référentiel théorique.
Nous avons encore affaire à des critiques projectives et non de professionnels de terrain.
Ils confondent l’interprétation sauvage avec l’interprétation comme outil psychothérapeutique par manque de connaissance et d’expérience. Cette critique faite à la cure psychanalytique est encore et toujours véhiculée par des personnes qui revendiquent un savoir et une expérience qu’ils n’ont tout simplement pas.
Pour conclure
Pour conclure, je rappellerai que l’interprétation est un outil universel qui nous permet de représenter notre monde interne et le monde externe.Parfois, l’interprétation nous sauve, parfois elle est douloureuse. Chaque personne doit donc se rappeler le caractère hypothétique de ses interprétations et être prêt à la ré-interprétation personnelle.
Comme évoqué, l’interprétation d’un tiers amène une ré-interprétation personnelle. C’est vraiment pour cette raison qu’une interprétation doit-être méthodique, bienveillante et justifiée dans le temps et la relation.
C’est ce qui fait la différence entre une interprétation à visée thérapeutique et une interprétation sauvage qui peut parfois mener à des représentations liberticides et pathogènes.
Dr Manhatan dans Watchmen nous est présenté comme un demi dieu mais lui aussi pointe sa limite : « Je peux changer à peu près n’importe quoi, mais la nature humaine je ne peux la changer »
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Oui, vous pouvez vous dire que ce n’est pas un sujet de psychologie… Mais laissez-moi vous montrer comment Scarface, le film culte de DePalma nous apprends de grands fondamentaux de psychologie.
Il nous faut dès à présent poser le contexte pour que vous compreniez en quoi ce film est culte alors que le personnage de Tony Montana m’est particulièrement antipathique.
Scarface est un film sortie en 1983, de Brian de Palma, petit réalisateur qui, fun fact, découvrit robert de Niro dans « the wedding » party en 1963 même si le film sort au final en 1969.
D’après un scénario de Oliver Stone il faut bien se douter que l’on est pas seulement dans un simple film de gangster mais un film qui aura une valeur de critique ou tout du moins de regard politique et social puisqu’Oliver Stone est un artiste engagé avec des idées fortes et assumées. Nier cet aspect du film est selon moi une grave erreur si on veut en comprendre le véritable regard et ce qu’il souhaite dénoncer.
En bref, l’histoire de scarface prend appui sur un fait réel : l’exode de Mariel. Un événement de l’histoire cubaine durant lequel le régime de Fidel Castro expulse près de 125 000 Cubains considérés comme contrerévolutionnaires.Le choix de De Palma, dès le début du film, en nous montrant des images d’archives, indique son souhait de nous montrer une réalité. En l’occurence Oliver Stone, nous propose son idée autour du désir de passer du communisme au libéralisme, par la fuite de Cuba vers les Étas-Unis.
Toujours pas de psychologie mais patience, nous allons y venir…
Là où le plus souvent on entend parler de scarface comme l’ascension d’un homme partit de rien pour arriver au sommet – ce qui est la première strate de lecture – Tony Montana nous montre surtout l’ascension d’un homme qui est prêt à tout, qui ne respecte rien ni personne pour posséder et jouir toujours plus… Jusqu’à ce que ça le tue.
En gros, la problématique psychologique que nous illustre Scarface, c’est la problématique « limite ».
L’histoire de Tony Montana s’inscrit dans un passage du communisme où il se voit comme un mouton, vers la liberté et l’opulence, c’est à dire la promesse du rêve américain. Ce qui pour lui est synonyme d’avoir tout ce qu’il souhaite sans aucune limite.
Pour ma part, ce que je souhaite pointer c’est le symptôme de Tony Montana. Un symptôme de plus en plus répandu et qui n’est que rarement remis en question dans notre culture occidentale. Savoir se poser des limites. Limiter sa jouissance.
D’un point de vue psychopathologique, ce symptôme rend impossible le fait d’être heureux et d’être satisfait dans sa vie. Voyons ça directement avec Tony Montana,personnage qui selon moi-mérite beaucoup de choses mais pas d’être érigé au statut d’icône…
Attention la suite contient des spoilers.
Psychologie de Tony Montana
Dès le début du film, on voit que Tony parvient à s’extraire du camp de réfugié en tuant un homme. Ça annonce immédiatement la couleur. À aucun moment on peut nous faire croire que Tony respecte, les lois des hommes ou autres, il suit les opportunités qui mènent à ce qu’il convoite.Après une scène d’une rare violence dont Tony ressort plutôt vainqueur sur le plan business, il commence sa fameuse ascension dans laquelle il ne respecte pas son « boss » au point de lui piquer ouvertement sa femme et son réseau, il finit d’ailleurs par tuer son patron, manquer de respect à sa femme, tuer son meilleur ami et c’est au moment où on le voit pour la première fois avoir une position éthique : c’est en ne voulant pas tuer une femmes et des enfants innocents qu’il se retrouve enfin a avoir des ennuis qui causeront sa perte…
Bref, Tony Montana est un être horrible, certes, mais surtout il meure sans même avoir pu montrer de réels moments de bonheur. Et c’est ça qui nous intéresse sur le plan psychologique.
Le fonctionnement psychologique de ce self made man qui aura gravi tous les échelons peut-il au final mourir quasi seul et sans avoir pu profiter véritablement de sa richesses, de voitures de luxe, d’une maison luxueuse (mais de mauvais goût), d’une belle femme, d’un ami de confiance…
Et bien oui !
Le fait qu’il ne soit pas en mesure de limiter lui-même sa jouissance fait que cette limite ne puisse venir que d’un réel. C’est à dire de quelque chose qu’il ne peut se représenter ou imaginer.
Comment peut-il passer autant à côté de tout ce qui est sensé le rendre heureux puisque c’est ce qu’il a toujours convoité ?
Et bien la psychologie et la psychanalyse nous donnent plusieurs pistes précieuses pour répondre à cette question :
Pour les plus « neuros » d’entre vous, il est tout d’abord question de dopamine :
La dopamine entre en jeux lorsque l’on prévoit une récompense plus que lorsqu’on l’obtient véritablement.
Et point le plus important, l’espérance de la récompense, par la libération dedavantage de dopamine, va motiver le comportement, plus que le circuit de la récompense lui-même.
On peut retrouver des pistes similaires dans ce que Freud nomme dans ses premières théories du principe de plaisir. Pour le Freud du début du 20ème siècle, l’être humain acterai sa vie autour des plaisirs.
À partir de 1920, Freud parlera de l’au delà du principe de plaisir qui rend bien compte que ce qui motive le sujet va bien au de la de sa simple recherche de plaisir et que ça a à voir avec la pulsion de mort.
Ce qui nous amène très logiquement Chez Lacan et son concept de jouissance, où le plaisir est dépassé pour aller jusqu’au mortifère, à la souffrance. Et quand on voit Tony Montana, il est clairement plus du côté d’une jouissance que du plaisir. Ne parvenant pas à limiter sa jouissance, c’est le réel de la mort qui vient faire limite.Mais tout au long du film, on voit aussi combien il sera question de désir et Brian de Palma nous l’expose très pertinemmentgrâce au regard. Tony convoite certes, mais ce qu’il a de plus que les autres, c’est sa capacité à voir ce qui fait désir pour l’autre, ce que l’autre convoite. Et c’est ça qu’il cherche avant tout, qu’on le regarde, lui, avec convoitise.
Qu’il soit admiré pour son avoir et non pour son être. Une problématique narcissique classique mais que Tony Montana porte à son paroxysme.
« Convoitez ce que j’ai convoité car à présent je l’ai obtenu »
L’insatisfaction au service de la consommation
Malheureusement, la psychologie humaine nous montre constamment que l’être humain imagine des bénéfices certains face à un objet qu’il convoite pour finalement en être déçu une fois cette chose approchée, faite ou obtenue. La publicité fonctionne exactement sur ce processus : susciter l’envie et le désir en faisant miroiter au consommateur que c’est de telle ou telle chose dont il a besoin pour se sentir complet, sûr de lui ou encore heureux.
Rappelez-vous le nombre de fois ou vous avez désiré ardemment quelque chose pour qu’au final, au bout de quelques temps, vous n’en soyez plus satisfait et que vous commenciez naturellement à convoiter autre chose.
Et Tony il est complètement là dedans…
Cette phrase qui passe sur un zepplin : « the world is yours« , qu’il reprend sur une sculpture devant chez lui, nous dit clairement que le monde doit être à lui. Rien de moins.
Enfin, on peut aussi trouver une lecture similaire dans la bible lorsque Adam et Eve sont dans le jardin d’Eden et que la seule règle qui leur est donnée est qu’ils peuvent jouir de tout ce qui leur est offert, SAUF, de la pomme. Cette règle unique peut nous faire entendre que pour vivre au paradis et être heureux, il faut accepter de ne pas tout avoir, de savoir restreindre son désir pour qu’il y ai toujours du désir sans quoi, les difficultés arrivent…
Ce que j’observe très fréquemment dans mes séances, ce sont des hommes qui viennent consulter pour dépression et un manque flagrant de motivation pour toute chose une fois qu’ils ont 45-50 ans… Or, 45-50 ans, c’est souvent la période où les hommes ont fini par obtenir tout ce dont ils ont toujours rêvés. Ils ont enfin la situation professionnelle tant attendue, la femme, les enfants, le chien, l’écran plat, la belle voiture, et j’en passe. Passé ce moment, ils viennent en séance et ne savent plus du tout quel sens donner à leur vie. Ils sont comblés. Et ça les amis… L’être humain n’aime pas du tout. Mais alors pas du tout.
Le risque est alors d’aller chercher ailleurs ce qui sembleraifaire défaut. Ils souhaitent changer de vie, de travail, de femme… Mais le plus fréquemment, de voiture. 🙂
Pour conclure
Vous l’aurez compris, Tony Montana est un éternel insatisfait puisqu’il est obnubilé et ne pense toujours qu’à ce qui lui manque et non pas à ce qu’il a déjà. Il se démène sans cesse pour obtenir toujours plus et se focalise sur ce qui serait censé lui manquer.
Si vous aussi vous vous trouvez toujours être insatisfait, pensez un peu à Tony Montana, pensez à toutes les stars et personnalités réelles qui ont tout mais ne peuvent pour autant jamais se sentir heureux.
La combine n’est donc pas d’avoir toujours plus, mais de savoir limiter son désir.
Savourer ce que l’on a accompli, aimer ce qui nous entoure déjà et, en même temps, rêver de ce qui serait encore faisable ou de quelle expérience on peut facilement se nourrir.
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Pour en savoir plus :
P. Collignon, Heureux si je veux : En finir avec l’insatisfaction chronique (2015), Editions Eyrolles : https://amzn.to/3m904Mv
J.-P. Hiltenbrand, Insatisfaction dans le lien social (2005), Editions Humus : https://amzn.to/3dUDLHz
L. Aschner, Qu’est-ce qui m’empêche de me sentir bien ? – Pour en finir avec l’insatisfaction chronique (2005), Intereditions : https://amzn.to/31m4CHe
Commençons par une définition de la maladie d’Alzheimer :
La maladie d’Alzheimer est une maladie neuro-évolutive, qui se traduit principalement par des troubles de la mémoire et de l’orientation dans le temps et l’espace. À ce jour, il existe 1,2 millions de personnes malades en France dont 35 000 ont moins de 65 ans. C’est 225 000 nouveaux cas par an rien qu’en France alors que nous n’avons toujours pas de traitement curatif.
C’est le fait que notre mémoire et nos évolutions dans notre environnement constituent notre identité, notre personnalité et notre autonomie qui fait que cette maladie nous fait peur, nous avons tous conscience que ce soit pour nous ou nos proches que la maladie fait perdre ce que nous sommes pour nous, mais aussi pour les autres.
Quels sont les signes principaux de la maladie ?
Troubles de la mémoire :
Mémoire à court terme C’est ce qui assure le maintien de l’information pendant un temps limité. Avec la maladie, la capacité à garder une information quelques secondes ou à l’enregistrer est altérée et cela va forcément impacter les autres mémoires.
La mémoire épisodique Elle permet l’enregistrement d’informations nouvelles associées à un moment et un lieu. C’est la mémoire qui restaure le souvenir d’événements vécus personnellement est donc emprunt d’émotions. Au début de la maladie, la personne ne pourra plus faire entrer de nouveaux souvenirs mais pourra restituer ceux déjà mémorisés. Puis, elle perdra leur accès, des souvenirs les plus récents vers les plus anciens.
La mémoire sémantique Ces sont nos connaissances culturelles. La personne ne sait plus où et quand cette information a été apprise ce qui par conséquent rend difficile l’enregistrement de nouvelles connaissances et l’accès à sa culture générale.
Autres troubles cognitifs :
Les troubles du langage Il s’agit aussi bien de l’émission et de la réception du langage. Le vocabulaire s’amenuise et certains mots phonétiquement proches (bateau à la place de gâteau) sont substitués. Le langage peut finir par se réduire à des phrases automatiques.
Les fonctions exécutives Ce sont les aspects de la pensée de haut niveau indispensables à la vie : se concentrer, planifier, raisonner et s’adapter. Avec la progression de la maladie les fonctions exécutives diminuent en efficience, la personne aura tendance à abandonner progressivement les tâches liées à ces ressources.
Les gestes élaborés
Boutonner sa chemise par exemple devient difficile à réaliser. La motricité élémentaire quant à elle est longtemps préservée dans les formes habituelles de la maladie.
Les troubles de la reconnaissance Ils empêchent la reconnaissance visuelle, olfactive, auditive et même au toucher. On ne peut qu’imaginer à quel point cela aussi puisse être anxiogène.
Parallèlement aux troubles cognitifs vont apparaître des Troubles de l’humeur et du comportement :
Ils peuvent être la conséquence des lésions neurologiques mais aussi de la prise de conscience des troubles cognitifs. Tristesse, pessimisme, dévalorisation… La personne malade se décourage, pleure, pense qu’elle n’a pas d’avenir, qu’elle est un fardeau pour ses proches et évoque même parfois le désir de mourir.
De brusques changements d’humeur peuvent aussi survenir. La personne malade passe du chaud au froid et du froid au chaud en quelques instants et sans raison apparente. Cela se traduit par des crises de colère ou encore des difficultés à supporter des choses banales. Un simple retard à un rendez-vous peut provoquer une réaction de catastrophe.
Agressivité, déambulation, désinhibition, les troubles du comportement, eux, peuvent s’exprimer ou non durant la maladie. Ils sont la conséquence directe des lésions cérébrales mais leur expression et leur intensité peuvent être influencées par des facteurs environnementaux.
La Désorientation spatio-temporelle :
La personne malade peut aussi perdre progressivement ses repères dans le temps et dans l’espace. Même s’il existe des supports pour palier un temps à ces désorientations, ceux-ci ne peuvent aider la personne que jusqu’à un certain point de la maladie.
Il est important de comprendre que tous ses troubles ne se manifestent pas d’emblée. La maladie va se déclarer plus ou moins sur un plan ou un autre, et évoluer à différente vitesse selon les individus. Globalement, nous parlons de 3 stades d’évolution :
STADE LÉGER
Environ 25% de l’hippocampe diminue en volume et le lien entre mémoire à court terme et à long terme se fait plus difficilement. La personne a des oublis bénins de noms ou d’événements récents qui s’intensifient avec le temps.
STADE MODÉRÉ
D’autres zones du cerveau sont touchées, ce qui engendre des troubles des gestes, du langage et de la reconnaissance. La personne a besoin d’une aide pour certaines activités (se déplacer, gérer son budget, faire à manger, etc.).
STADE SÉVÈRE
Les lésions progressent et la récupération en mémoire des informations et événements passés est quasiment impossible. La personne a perdu son autonomie pour presque tous les actes de sa vie quotidienne.
Une question vient alors
QUELLES EN SONT LES CAUSES ET COMMENT LES PRÉVENIR ?
À ce jour, les chercheurs n’ont pas déterminé la ou les causes de l’installation de ces lésions. Le consensus se porte sur des causes pluri-factorielles.
Les facteurs biologiques peuvent être génétiques ou physiologiques, liés au développement de pathologies comme l’hypertension ou le diabète.
Les facteurs comportementaux concernent, eux, l’histoire de vie de chaque individu: son niveau d’étude, ses habitudes alimentaires, sa consommation de tabac et d’alcool.
Vous comprenez donc que face à une maladie sans traitement curatif et aussi impactante, la question de l’accompagnement est centrale.
C’est justement ce que France Alzheimer et maladies apparentées ont à coeur :
Proximité, accompagnement et inclusivité
Proximité :
Grâce à aux associations départementales et aux 2200 bénévoles, il existe une véritable proximité et un travail de terrain. L’ensemble des associations sont à l’écoute des familles et de leurs besoins en se trouvant à leur portée.
Cette proximité avec les personnes malades et les aidants permet de connaître les besoins et les attentes des familles, mais aussi de comprendre leur quotidien et leurs difficultés
Accompagnement :
Le travail de l’association montre tout le potentiel des activités stimulant les fonctions cognitives et sensorielles des personnes malades. Leurs familles, elles, doivent avoir un accompagnement sur-mesure qui leur permette de s’adapter aux différents stades de la maladie et de prendre de nécessaires temps de répit.
L’association accompagne les personnes malades, les aidants et les familles durant toutes les étapes de la maladie, en leur proposant des activités adaptées et une aide précieuse et diverse.
Inclusivité :
Tournée vers l’inclusivité, l’association France Alzheimer et maladies apparentées lutte contre toute forme de préjugés. La peur ou l’ignorance nous rend parfois impuissants ou mal à l’aise vis-à-vis de celles et ceux qui ne nous demandent qu’un peu de bienveillance.
Changer de regard sur la maladie, c’est aider les personnes concernées à poursuivre leurs activités sociales ou civiques. Changer de regard sur la maladie, c’est lutter contre les tabous qui empêchent des familles entières d’organiser leur parcours de soins, leur parcours de vie.
Face à une maladie terriblement anxiogène, l’association se bat contre les préjugés qui enferment et isolent, contre les peurs qui conduisent les personnes malades à retarder leur diagnostic, contre les tabous qui empêchent des familles entières de poursuivre leurs activités sociales ou civiques.
Les actions menées par les associations :
Sensibiliser l’opinion et les pouvoirs publics
L’association se mobilise et porte la voix des familles sur de nombreux sujets relatifs à la prise en soins des personnes malades et à l’accompagnement de leurs proches aidants.
Contribuer au progrès de la recherche
Cela passe par des projets de recherche innovants et prometteurs afin de faire avancer les connaissances scientifiques et médicales et ainsi mettre au point des traitements spécifiques et efficaces.
Former les professionnels de santé
Parce que lutter contre la maladie d’Alzheimer et les maladies apparentées, l’Institut France Alzheimer forme les professionnels qui accompagnent les personnes malades en perte d’autonomie.
Accompagner et soutenir les familles
Un malade, c’est toute une famille qui a besoin d’aide. Tout le réseau France Alzheimer et maladies apparentées, propose des solutions adaptées, à chaque étape de la maladie.
Jérémie Gallen,
psychologue clinicien,
psychothérapeute en ligne
Dans cet article nous allons découvrir les signes cliniques spécifiques aux borderlines,mais aussi et c’est pour le coup très important pour le traitement qui va s’ensuivre, les comorbidités fréquentes, c’est à dire les troubles fréquemment associés et le diagnostic différentiel le plus commun (Comme d’habitude, toutes les sources se trouvent en fin d’article). Nous illustrerons tout cela, comme toujours, avec un cas clinique tiré du cinéma et donc aujourd’hui, je vous conseille fortement d’avoir vu Mommy de Xavier Dolan avant de lire cet article car je vais devoir spoiler ce chef-d’oeuvre de bout en bout. Mais vraiment… je vais spoiler jusqu’à la dernière seconde du film…
Si l’on se réfère à la Classification International des Maladies (CIM-10), le trouble de la personnalité borderline fait partie des personnalités émotionnellement labiles.
Selon cette classification, cela veut dire, je cite : « une tendance nette à agir de façon impulsive et sans considération pour les conséquences possibles, une humeur imprévisible et capricieuse, une tendance aux explosions émotionnelles et une difficulté à contrôler les comportements impulsifs, une tendance à adopter un comportement querelleur et à entrer en conflit avec les autres, particulièrement lorsque les actes impulsifs sont contrariés ou empêchés. »
Si vous suivez bien les vidéos de la chaîne, ces caractéristiques devraient vous faire immédiatement penser aux « Va te faire suivre » numéros 27, 28, 29 et 30 DONC aux personnalités relevant d’une structure qui n’est ni névrotique, ni psychotique mais bien d’un état-limite.
Vous comprenez donc mieux pourquoi le diagnostic différentiel sera important.
La classification International des Maladies caractérise plus précisément le trouble de la personnalité borderline par :
des perturbations de l’image de soi,
des perturbations de l’établissement de projets et des préférences personnelles,
par un sentiment chronique de vide intérieur,
par des relations interpersonnelles intenses et instables et
par une tendance à adopter un comportement autodestructeur, comprenant des tentatives de suicide et des gestes suicidaires.
Avec tout le respect que j’ai pour cette classification, quand on reçoit en séance des personnalités borderline et quand on s’intéresse à une littérature plus large, on se rend vite compte qu’il manque ici une caractéristique majeure : l’Angoisse d’abandon.
Beaucoup d’auteurs se sont d’ailleurs servi des travaux de la psychologue et psychanalyste suisse Germaine Guex et de ses travaux depuis 1950 sur ce qu’elle appelait la névrose d’abandon pour rendre compte de la phénoménologie des états limites puis du Borderline.
Parler de la personnalité borderline sans aborder spécifiquement son rapport à l’abandon est une erreur qui justement va encore jouer en notre défaveur sur le plan diagnostic, donc aux caractéristiques précédemment cités.
Prenons la liberté de rajouter les manifestations d’angoisse d’abandon. Vous allez comprendre que cela est important pour le diagnostic différentiel.
Alors, concrètement, comment est-ce que tout cela va se manifester chez le sujet ?
Les perturbations de l’image de soi, C’est un aspect très important de la personnalité du borderline, la perturbation de l’image de soi fait que la personne n’a pas suffisamment d’assises sur ce qu’elle pense être en tant que personne, mais aussi, pour et par rapport aux autres.
Vous pouvez donc la voir tantôt un jour fonctionner d’une manière et un autre fois de façon complètement différente.Et nous touchons là à un point que je souhaite absolument que vous gardiez en mémoire concernant le borderline : les objets externes ont une importance bien plus grande que les objets internes ! Pour rappel selon le référentiel psychodynamique les objets sont à la fois des objets physiques, des personnes, des caractéristiques ou des qualités.Nous pouvons donc investir des objets, les projeter, les intégrer, les cliver etc. etc.Donc vous comprenez bien ce que cela veut dire pour les perturbations de l’image de soi : l’individu sera tributaire de ce que lui dit ou fait ressentir son environnement plutôt que de se référer à ce que lui-même pense de lui ou de ce qu’il ressent.
La personne ne peut pas s’appuyer sur son image de soi, sur ses émotions, sur ses pensées mais préfère plutôt porter du crédit et une importance faussée au caractère incertain et fluctuant que lui prête son environnement.
Perturbations de l’établissement de projets et des préférences personnelles, Dans la continuité de ce que l’on vient d’évoquer, cela joue particulièrement aussi sur ce que la personne borderline projette de son avenir.Les projets sont aussi soumis aux fluctuations du discours environnant, de l’image que cela renvoie de lui, des émotions que ça procure aux uns, aux autres et à lui-même…
C’est un peu comme si rien ne pouvait vraiment s’ancrer dans le sujet et qu’il était toujours balloté au grès des vents, des marais et de la houle…
Sentiment chronique de vide intérieur, Ici déjà nous pouvons faire un lien avec l’angoisse majeure d’abandon et ses conséquences.Comme évoqué, l’ancrage dans une identité forte fait défaut. Le sujet borderline va sans cesse chercher à l’extérieur ce qui devrait le constituer de l’intérieur. Mais vu que rien ne tient jamais, c’est le lourd sentiment de vide et souvent même de solitude qui domine.Ce qui fait normalement nos objets internes n’a pas de persistance suffisante et le borderline va sans cesse chercher à intégrer de nouveaux objets pour lui donner consistance, valeur et confiance.
Relations interpersonnelles intenses et instables Ici encore nous allons parler des objets précédemment cités.Pour le borderline, l’autre est un objet qui dit quelque chose de lui : « Si cette personne qui a tant de qualités est avec moi, c’est bien que j’ai des qualités et de la valeur ! »Les objets externes sont extrêmement polarisés, ils sont soit de très bons objets idéalisés et vus comme parfaits ; Soit de mauvais objets qu’il rejette, dont il ne voit, perçoit, rien de bon.Et oui, c’est bien la même chose pour les personnes. Elles vont souvent être complètement idéalisés tant que les émotions, les cognitions et autres expériences seront bonnes à ses côtés.
Une fois qu’un individu fait vivre une mauvaise expérience au borderline, il devient très facilement mauvais objet ou au moins cela va créer une déception extrêmement forte.
Comportements autodestructeurs (tentatives de suicide / gestes suicidaires).Imaginez que vos relations ne soient pas stables, que vous avez souvent le sentiment d’être vide de l’intérieur, que vos amis ou activité vous déçoivent, que vous ne savez pas exactement qui vous êtes et comment vous fonctionnez…Beaucoup vont donc choisir de vivre des expériences extrêmes et douloureuses pour maitriser un tant soit peu de leurs sensations et émotions. On va donc avoir des mises en danger, des scarification, de la toxicomanie qui sont également des sensations et émotions que l’on va pouvoir rejouer pour mieux les intégrer.Dans le pire des cas, les tentatives de suicides se présentent également comme la solution pour faire stopper toutes les souffrances et incompréhensions.Malheureusement ses actes ont plus quelque chose à voir avec l’impulsivité du borderline par rapport à ses ressenties et émotions qu’a un réel projet mûrit à long terme.
Angoisse d’abandonElle va se manifester aussi bien sur des interprétations réelles que fantasmatique, c’est à dire qu’un éloignement réel va être très difficile à vivre mais qu’un éloignement imaginaire va apporter les mêmes difficultés émotionnelles.Le borderline va presque modeler sa vie, agir en fonction de l’angoisse d’abandon. Tout va être fait pour ne pas être abandonné, le faux self aura notamment comme objectif de se faire accepter. On peut avoir des comportements de validations perpétuels sans jamais se positionner contre… Mais lorsque l’abandon sera plus où moins ressenti, le borderline aura toujours la même réaction impulsive : sa réaction infantile.Et ça c’est un vrai problème car lorsqu’il agit avec impulsivité sur un mode infantile, ça va rarement être la bonne réaction, le bon comportement, à la situation dans laquelle il se trouve.Du coup, on va avoir une auto-réalisation des prophéties avec bel et bien des abandons. Le borderline, va comme toujours accorder une importance démesurée aux éléments externes et valider sa croyance que l’autre l’abandonne alors que c’est dans la grande majorité des cas pour des causes internes qu’il subit un abandon.
C’est donc une flagrante erreur de locus de contrôle (c’est à dire placer la cause au mauvais endroit) mais c’est clairement consécutif et défensif pour sauver l’image du moi.
Vous voyez, chez le borderline, tout est lié et la boucle est bouclée.
Cas Clinique
Je vous propose à présent de nous intéresser à Steve O’connor Desprès, personnage de 15 ans dans le film Mommy de 2014 de Xavier Nolan.
Steve est immédiatement dépeint dans le film comme un garçon hyperactif qui vivait dans un centre de rééducation mais qui suite à des comportements dangereux et inappropriés envers autrui va devoir être récupéré par sa mère.
Je parle ici de son diagnostic qui est mis en avant car beaucoup de psychiatres et psychologues ont depuis repris cela dans plusieurs articles de blogs en disant que Steve était hyperactif avec un trouble oppositionnel…
Je vais vous expliquer en me basant exactement sur ses faits et gestes en quoi c’est insuffisant selon moi et dans un second temps, la partie diagnostic différentiel nous permettra d’être encore plus précis.
Ce qui est frappant chez Steve c’est qu’a aucun moment dans le film il n’est montré avec des amis ou en compagnie de personnes de son âge. Steve semble en difficulté pour lier des relations en revanche avec chaque personne qu’il rencontre. C’est justement ce qui est mis en scène avec la voisine Kyla qui est pourtant là pour l’aider. Il ne montre pas de gratitude envers elle, bien au contraire.
Irrespectueux envers Kyla, il devient finalement très respectueux et lui fait des déclarations régulières. Cette femme a réussi ce que beaucoup ne parviennent pas à faire avec Steve : gagner sa confiance et son respect – après si tout le monde doit le menacer jusqu’à ce qu’il se pisse dessus (littéralement dans le film) pour gagner son respect, on pourrait peut être travailler sur le rapport à l’autre et les enjeux relationnels.
Quoi qu’il en soit, il y a un aspect important dans la relation avec Kyla pour qu’elle finisse par devenir un bon objet : c’est qu’au départ, elle n’est pas un mauvais objet. Steve montre qu’il la trouve séduisante, elle ne lui fait pas d’ombre envers sa mère, elle a une faille visible, ou plutôt audible d’ailleurs. Pour Steve, Kyla est un objet ni bon, ni mauvais en soi, mais un objet qu’il pourrait convoiter et utiliser à ses fins. Ce n’est que plus tard qu’il va donc l’accepter comme femme digne de respect et qu’il va véritablement investir.
Ce n’est absolument pas le cas avec Paul, ce voisin qui pourrait professionnellement venir en aide à steve face à tous ses problèmes. Paul est vue par Steve seulement comme un mauvais objet. Sa mère tâche de lui expliquer à plusieurs reprises qu’ils ont besoin de lui pour l’aider dans son avenir, en faisant ça, on comprend que sa mère sait que Steve ne perçoit Paul que comme quelqu’un de néfaste, mais tente de lui faire entendre qu’il doit finir par le voir comme un sujet ambivalent. C’est à dire « oui, tu ne l’aime pas MAIS il n’est pas que mauvais, il y a aussi du bon ».
Steve ne parviendra pas à accéder à cette notion fondamentale et l’objet restera très polarisé négativement. Steve décidera d’abord de montrer encore plus d’amour à sa mère que ne peut lui en montrer ce concurrent qu’il minimise avant de péter les plombs et se laisser emporter par ses émotions. Il parvient ici à faire un coup double : évincer le concurrent et rester l’objet d’amour unique de sa mère. Enfin bon, ça se discute… Mais, on comprend bien que le bénéfice numéro 1 est de ne pas vivre un sentiment d’abandon.
Parlons à présent de la scène ou Steve embrasse sa mère sur la bouche… Est-ce qu’un enfant ayant un TDAH ferait ça ? Il ne faut pas confondre hyperactivité ET impulsivité, ce sont deux choses différentes. Ici, Steve témoigne de son manque de repères (sans mauvais jeu de mot) et c’est bien sur l’impulsion d’une tension libidinale (dira t-on pour rester prudent) qu’il se laisse aller à ce que ses ressentis lui dictent.
Last but not least, les comportements suicidaires de Steve : Pas besoin de faire un dessin, au détour d’une simple conversation dans un supermarché, il change de rayon pour trouver un couteau et se tailler les veines, ce qui en terme d’impulsivité est quand même difficile à battre… Et tant qu’à spoiler le film de A à Z et bien oui, il fait peu de doute que la fin du film se conclut sur une tentative de nouveau record de saut en longueur… Nous ne pouvons pas penser autre chose que le fait qu’il se défenestre.
Impulsivité, besoin d’amour, besoin d’être rassuré, clivage de l’objet, angoisse de perte d’objet, tentatives de suicides, tout dans le discours et le comportement de Steve nous montre une personnalité franchement borderline.
Alors ? Est-ce que mes confrères et consoeurs ont tort de dire que Steve a un Trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité ? Abordons à présent le diagnostic différentiel et les comorbidités du trouble de la personnalité borderline.
Diagnostic Différentiel
On ne va seulement aborder que 2 troubles qui méritent franchement d’être distingués du trouble borderline : le trouble bipolaire et le trouble anxieux.
Le trouble bipolaire
Il y a deux différences fondamentales entre le trouble bipolaire et le trouble borderline :
Les changements d’humeur du borderline sont rapides et sont surtout consécutifs de l’environnement. Le bipolaire, lui, va avoir des épisodes maniaques massifs, c’est à dire très forts en intensité et en durée, suivi d’épisodes dépressifs tout aussi massifs en intensité et en durée. Et là, ce sera clairement dû à des phénomènes internes du sujet.
Trouble anxieux
Vous pourrez toujours distinguer le borderline du trouble anxieux car la trame anxieuse du borderline tourne le plus souvent autour des questions relationnels, d’acceptation, de rejet, de confiance en soi et d’abandon. Le trouble anxieux lui, ne se cantonne pas seulement à ces dynamiques interpersonnelles.
Comorbidités
À présent voyons trois comorbidités extrêmement fréquentes pour le borderline : la dépression, le trouble anxieux et le TDAH !
Il est très simple de comprendre que face aux difficultés relationnelles récurrentes et persistantes du borderline, ainsi que son sentiment de vide intérieur chronique, celui-ci soit très souvent déprimé.
Nous allons également souvent retrouver un trouble anxieux en plus d’un trouble borderline car comme évoqué plusieurs fois, le borderline est extrêmement perméable à son environnement. Puisque les objets internes ne sont pas suffisamment étayants, suffisamment stable, trop d’importance est donnée à l’environnement et celui-ci est souvent assimilé comme persécuteur et anxiogène.
Enfin le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité.
La comorbidité entre TDAH et trouble borderline est très forte. Un étude suédoise de 2018 ayant porté sur plus de 2,1 millions de personnes diagnostiqués entre 1997 et 2013 indique que les personnes présentant un TDAH ont 19,4 fois plus de chance que des non TDAH d’avoir un trouble de la personnalité borderline.
Dans une autre étude de 2011, des chercheurs ont quant à eux évalué que l’étiologie partagée (génétique – environnement) entre les symptômes du trouble borderline et du TDAH est une cause probable de la comorbidité des deux troubles.
Thérapie :
Les psychothérapies du trouble borderline sont aujourd’hui estimée comme efficaces. De nombreux articles en attestes. De même pour les traitements médicamenteux qui ont une efficacité prouvé lorsque la fenêtre optimale a été atteinte. Enfin, et bien évidemment, les meilleurs résultats à long termes se présentent lorsque l’on a un traitement médicamenteux additionnée à une psychothérapie.
Alors ? Est-ce que mes confrères et consoeurs ont tort lorsqu’ils disent que Steve est atteint d’un TDAH ? Où est-ce moi qui ai tort en maintenant qu’il a un trouble borderline ?
Et bien nous avons tous raison mais ce n’est pas du côté de diagnostic différentiel qu’il faut se positionner mais de la comorbidité. C’est à dire que oui, on peut avoir un bureau de tabac et la syphilis…
Steve a un trouble de la personnalité borderline ET un TDAH. Mais selon moi, la question de la personnalité est primordiale sur la question secondaire d’une manifestation de trouble de l’attention.
Tout le monde ne sera pas d’accord avec ce point de vue et tant mieux. Mais Cliniquement, je repère davantage de bénéfices thérapeutiques à soigner le trouble Borderline de Steve que son TDAH.
Dans la mesure où un psychologue travaillera mieux sur un trouble de la personnalité que sur un trouble plus neurodéveloppemental, je pars du principe que le bénéfice psychothérapeutique sera supérieur, et sur du plus long terme, en aidant Steve dans son rapport à l’autre, dans la construction d’une image de soi stable, en travaillant sur son angoisse d’abandon et en puisant des ressources internes et non soumises aux facteurs externes.
J’insiste d’ores et déjà sur le « thérapeutique » dans le titre de cet article puisque cela n’a strictement rien à voir avec l’hypnose de spectacle à la Mesmer… donc non, un thérapeute certifié ne vous fera jamais faire la poule pour vous ridiculiser en public.
Dans cet écrit, nous allons tout d’abord définir ce qu’est l’hypnose, sur quoi elle se base et quelques standards de la pratique, comment elle est revenue au goût du jour et surtout, la question importante à se poser, est-ce que ça fonctionne ?!?!
En seconde partie, comme toujours, nous allons illustrer ce qui a été dit dans la première partie à l’aide d’une vidéo et du film « Get Out« , film que je vous conseille de voir car il est sympa comme tout, bien que absolument faux en de nombreux points pour ce qui concerne la pratique thérapeutique réelle et contemporaine.
C’est quoi l’hypnose ?
L’hypnose est un état de conscience modifiée. C’est la définition la plus simple et certainement la plus répandue de l’hypnose. Malheureusement quand on a dit ça, on a rien dit… L’hypnose véhicule encore tout un tas de mythes et contre-vérités. Cela est aussi bien dû au cinéma comme nous le verrons par exemple en seconde partie, qu’à l’hypnose de cabaret qui s’appuie directement sur ce côté « magique » dont les thérapeutes veulent se démarquer mais à la fois qui fascine davantage le public.
L’hypnose thérapeutique est donc une méthode qui s’appuie notamment sur la modification de l’état de conscience d’une personne pour obtenir d’elle des processus imaginaire augmentés et des défenses psychiques en baisse pour parvenir à la résolution de problèmes spécifiques physiologiques et/ou psychologiques. L’hypnose sera utilisée selon différentes méthodes par le professionnel dans le but d’accompagner son patient vers un but précis qui aura été spécifié en commun par le soignant et le patient.
Enfin il me semble important de signaler deux choses fondamentales à propos de l’hypnose et la transe hypnotique :
– Tout être humain a déjà expérimenté un état d’hypnose, ça nous arrive vraiment très fréquemment. L’exemple le plus courant mais à la fois le plus parlant c’est quand on fait un trajet habituel en voiture et qu’à la fin on éteint le moteur en se demandant comment on était arrivé jusque là. Autre exemple, lorsque vous lisez un livre et qu’arrivé à la fin de la page vous vous rendez compte que vous lisiez mais pensiez à complètement autre chose… – La deuxième chose importante c’est que nous sommes tous hypnotisables. Les personnes qui disent ne pas être hypnotisables sont en général des personnes qui n’ont jamais rencontré un hypnothérapeute qui, lui, va sélectionner et confectionner des inductions spécifiques et adaptées au sujet. Donc tout le monde peut être hypnotisé du moment que l’on adapte le temps et la méthode d’induction.
Est-ce que ça fonctionne ?
L’évaluation de l’hypnose en médecine soulève de nombreuses questions. Mais force est de constater que de plus en plus d’études sont engagées dans ce domaine, y compris en France, et que les résultats sont, suivant les domaines de recherche, très significatifs.
Je dis selon les domaines de recherche parce que sur le plan psychothérapeutique, il y a beaucoup d’écart selon les études pour rendre compte de l’efficacité de l’hypnose pour ce qui à trait à la psychopathologie.
En revanche, sur des domaines comme l’analgésie, la perte de poids, la réduction du stress, l’immunologie, (oui oui aussi étonnant que ça puisse paraitre je vous encourage à aller voir les sources en fin d’article) les données actuelles sont significatives quant à l’efficacité de l’hypnose.
Pour quelle utilisation ?
Il y a aujourd’hui 3 grands domaines d’utilisation de l’hypnose :
L’hypnosédation (utilisée principalement en anesthésie),
L’hypnoanalgésie (contre la douleur) et
L’hypnothérapie (à visée psychothérapeutique)
Suivant la formation initiale du professionnel et l’objectif recherché, il va utiliser différentes structures de séance et différentes méthodes d’inductions et de suggestions.
Les séances d’hypnoses contemporaines vont donc beaucoup s’adapter au patient et sont loin d’un discours plaqué d’un hypnotiseur tout puissant.
Mécanismes principaux de l’hypnose thérapeutique :
Grossièrement, lors d’une séance d’hypnose on va avoir une première phase dite d’induction hypnotique. Durant cette phase, le thérapeute va, par divers moyens, faire entrer la personne en transe hypnotique, le fameux « état de conscience modifié ». Que ce soit de façon très directive ou non, l’induction va faire appel à une anamnèse, c’est à dire l’histoire du patient, ainsi qu’à l’observation de tout un tas de canaux que l’on va relever comme spécifiques au patient en question. L’induction va donc sans cesse faire appel à ce que vie, ce que ressent et le rapport que l’individu à avec son environnement. C’est ce que l’on appelle la ratification, le « VAKOG » et autres termes que je ne vais pas aborder ici car ce n’est pas le but.
La deuxième phase importante sera la phase de suggestions.
Durant cette phase plus ou moins longue selon l’objectif de la séance, l’hypnothérapeute va, selon son référentiel, être encore une fois très directif (hypnose ericksonnienne par exemple) ou inviter davantage son patient à être actif de sa séance et ainsi faire de la communication hypnotique. Les deux méthodes fonctionnent mais vont devoir être privilégié selon la problématique et l’effet escompté. Malgré tout, plus la problématique va être complexe ou profonde, plus le thérapeute risque de choisir une communication hypnotique afin de rendre son patient le plus actif possible de son changement et de sa séance.
Une autre différence importante va être soit de focaliser l’attention sur un point très précis ou de justement tâcher de faire grandir l’état de conscience. Dans un cas le thérapeute oriente la concentration pour accéder, lui, à l’inconscient du sujet, dans l’autre cas, on est proche d’une pleine conscience qui permet au sujet d’avoir accès à une partie de son inconscient et ainsi augmenter ses capacités de résolution de problème.
Une fois les phases d’induction et de suggestions terminées, l’hypnothérapeute va ramener le sujet doucement et respectueusement à son état de conscience normal dans l’ici et maintenant.
Existe t-il des risques ou des effets secondaires ?
– Aux vues des données de la littérature, il n’a pas été rapporté d’effet secondaire grave de l’hypnose. Cela ne permet pas d’exclure leur existence, mais permet de dire que si de tels effets existent leur fréquence est relativement rare comme des céphalées, de la somnolence, des vertiges, de l’anxiété, et la création de faux souvenirs.
Le risque semble plutôt exister au niveau éthico-juridique (avec notamment le risque de manipulation psychologique et de création de faux souvenirs), et des chartes éthiques sont souvent proposées par les associations de professionnels, afin de garantir et de veiller à l’intérêt et au bien-être du patient.
Comme vous l’aurez compris, le problème ne vient pas tant de la méthode que du professionnel, de sa compétence et de son éthique.
Donc faites attention à la formation de votre hypnothérapeute car ce titre n’est actuellement pas protégé en France et n’importe qui peut s’auto-proclamer hypnothérapeute en ayant peu ou pas de formation de psychopathologie et ainsi faire dans le meilleur des cas, rien du tout, dans le pire, il peut aggraver un trouble.
Etude de cas
À présent, faisons un rapide tour d’horizon de ce que l’hypnose n’est pas en nous appuyant sur le film « Get Out » ou Chris se fait soit disant hypnotiser…
Comme vous avez pu le voir, ce scénario outrepasse les règles les plus fondamentales de la pratique hypnotique et nous sommes clairement dans une fiction où la magie et la manipulation se substituent à une hypnose véritable.
Donc si vous avez peur de l’hypnose, rassurez vous sur le fait que rien ne peut vous être fait de force et que vous restez toujours maître de votre pensé et de votre libre arbitre.
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Jérémie Gallen
Psychologue clinicien et psychothérapeute en ligne
sur www.survotredivan.fr
Sources et ressources :
– O.Lockert, Hypnose – Evolution humaine – Qualité de vie – Santé (2013) – IFHE Editions : https://amzn.to/3hfepod
– L. Chertok, Mémoires : Les résistances d’un psy (2006) – Odile Jacob : https://amzn.to/2ZzDwMe
– A. Andre : Hypnose: Comment apprendre l’hypnose et l’autohypnose étape par étape(2020) – (livre extrêmement court mais précis !) Amazon édition : https://amzn.to/39da8Pi
– C. Hammond, Métaphores et suggestions hypnotiques (2009) – Le Germe : https://amzn.to/3jcDjX4
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